Je ne peux me permettre que 554 $ en loyer

Je ne peux me permettre que 554 $ en loyer (je reçois l’aide sociale) pour un appartement à trois chambres, ce qui est absolument aberrant. Premièrement, j’aimerais vous remercier pour m’avoir donné l’occasion de vous faire part de mon expérience personnelle avec l’itinérance et l’instabilité du logement. Je suis une mère seule de trois enfants. Les deux plus jeunes vivent avec moi et le plus âgé habite dans un foyer de groupe à cause de ses problèmes de comportement.

C’est en 2004 que j’ai connu l’itinérance pour la première fois, après mon retour au Canada à la suite d’une mauvaise relation en Arkansas. Il n’y avait pas assez de place chez ma mère pour moi et mes trois enfants, et j’ai donc décidé d’aller dans un refuge pour sans-abri. Nous y sommes restés pendant près de trois mois, parce que je ne réussissais pas à trouver un logement adéquat pour mes enfants. Dès que j’en trouvais un qui nous convenait, je ne pouvais pas me permettre le loyer. Je ne peux me permettre que 554 $ en loyer (je reçois l’aide sociale) pour un appartement à trois chambres, ce qui est absolument aberrant.

Après avoir passé près de trois mois au refuge, j’ai emménagé avec une amie pour enfin pouvoir quitter le refuge. Je ne veux pas dire par là qu’on ne nous soignait pas bien au refuge, mais trois mois c’est trop long pour des petits enfants. Bien entendu, un an plus tard, je j’étais de retour au refuge, mon arrangement n’ayant pas fonctionné entre mon amie et moi. J’étais revenue à la case de départ. J’ai recommencé à chercher un logement privé mais je ne trouvais rien qui convenait à mon budget. Je n’ai donc pas eu le choix, j’ai dû choisir l’horrible London Housing. Si vous avez vécu ce que j’ai vécu et si vous savez ce que je sais sur ce logement, vous devriez comprendre ce que je veux dire. Ces logements étaient sales à l’intérieur et à l’extérieur, il y avait des armes à feu, des drogues, des trafiquants de drogue, de la violence et de l’alcool à chaque coin de rue. Il est difficile d’en sortir une fois qu’on y habite, puisque la seule alternative est le refuge pour sans-abri. Ma fille a vu des choses atroces et je ne peux qu’espérer qu’elle les oublie un jour.

Il me semblait à ce moment-là, tout comme aujourd’hui, que la société case les sans-abri n’importe où, tant qu’ils ne sont plus dans la rue. Est-ce que nous sommes supposés être satisfaits? Le 30 mai 2006, après une bagarre dans la rue dans laquelle des armes à feu étaient impliquées, j’ai décidé de plier bagages une fois de plus, et de retourner au refuge avec mes enfants. Nous y sommes restés jusqu’en septembre 2006. J’ai finalement obtenu mon propre appartement privé, un deux chambres qui me coûtait 705 $ par mois. Le loyer élevé m’a forcée à réduire mon budget alimentaire. Ce fut difficile mais ça en valait la peine. J’avais fermement décidé de ne pas élever mes enfants dans un environnement comme le complexe résidentiel London Housing.

Après quatre ou cinq mois, du moisi est apparu sur les murs et le chauffage est tombé en panne. Mes enfants sont devenus très malades (à ce jour, mon fils souffre toujours de problèmes de poumons) et je ne savais plus quoi faire. Je ne supportais plus l’idée de retourner au refuge et je refusais de retourner vivre dans un complexe résidentiel. Puis, un jour, au beau milieu de novembre, quelqu’un a frappé à ma porte. C’était une employée du refuge. Elle m’a annoncé que la ville allait lancer un programme pilote intitulé Hostel to Homes, et que je pouvais y participer si je le désirais. C’était plus que j’espérais! Elle a vu la moisissure et le manque de chauffage et nous a fait sortir de l’appartement. Elle nous a ramené au refuge craignant que notre santé et notre sécurité étaient compromises. On m’a aidée à trouver un autre logement dans la semaine qui suivit, et j’y vis encore à ce jour. Je suis heureuse de pouvoir dire qu’il s’agit d’un appartement privé, et non d’un complexe résidentiel. Je suis heureuse et mes enfants sont heureux. Mais il y a tant d’autres personnes qui sont encore coincées dans la situation dans laquelle je me trouvais.

Une autre chose qui me met vraiment en colère, c’est que la ville est en train de décider s’ils ont assez d’argent dans leur budget pour continuer à offrir ce programme. Et de l’autre côté, la ville a donné un quart de million de dollars pour installer ces drôles arbres fluorescents en métal au centre-ville. Le programme Hostel to Homes aide les sans-abri à trouver un logement et garde le contact avec la famille pendant une période allant jusqu’à 18 mois. En se promenant au centre-ville, on peut voir des adolescents, des adultes et des personnes âgées qui n’ont pas de domicile et qui mendient pour pouvoir manger. Honnêtement, qu’est-ce qui est plus important, des arbres fluorescents en métal ou aider des êtres humains en détresse? Il y a un profond malaise dans notre société. Nous, qui faisons partie de cette société, avons besoin de programmes tels Hostel to Homes, et non pas d’arbres en métal!

Date de publication: 
2007
Nouvel emplacement: 
London, Ontario, Canada