Je n’ai jamais voulu être une sans-abri. Personne ne veut être un sans-abri

Une combinaison de problèmes de santé mentale et un petit ami violent m’ont amenée dans un refuge pour sans-abri pour la première fois quand j’avais dix-sept ans. Je n’ai jamais voulu être une sans-abri. Personne ne veut être un sans-abri. La plupart des gens trouvent des millions d’excuses pour essayer d’expliquer pourquoi ces choses leur arrivent. En ce qui me concerne, c’est arrivé à cause de mon jeune âge et de mes mauvaises décisions. Lorsqu’on est jeune et qu’il n’y a personne pour vous guider sur le droit chemin, il arrive que l’on prenne de très mauvaises décisions. Une combinaison de problèmes de santé mentale et un petit ami violent m’ont amenée dans un refuge pour sans-abri pour la première fois quand j’avais dix-sept ans. J’ai commencé une relation avec un homme que je croyais être mon âme sœur, et elle a duré deux ans. J’ai fini par tomber enceinte. Au lieu d’être heureux, il s’est transformé en monstre. Il a tenté maintes fois de me tuer moi et l’enfant que je portais. J’étais brouillée avec ma famille depuis l’âge de quatorze ans, et il était donc hors de question que je leur demande de m’aider.

Je vivais dans la terreur. Ce n’était pas mon destin. Je méritais mieux que ça. J’avais beaucoup d’idées préconçues sur les sans-abri : je pensais que ce n’étaient que des ivrognes, des clochards, des drogués, les rejets de la société. Mais dès que j’ai commencé à écouter les histoires des autres sans-abri – des personnes ayant perdu leur maison dans des incendies, des réfugiés provenant de pays dévastés par la guerre, de nouveaux immigrants, des personnes abusées par leur famille ou leur conjoint, des femmes et des enfants jetés à la rue par des propriétaires de taudis. J’ai vite réalisé que ça pouvait arriver à n’importe qui, et que ça arrive quotidiennement.

J’avais vécu en dessous du seuil de la pauvreté, logé dans des appartements infectes, eu des relations avec des hommes qui je croyais allaient s’occuper de moi, je m’étais fait battre et presque tuée, j’avais trois enfants magnifiques, et je suis rentrée et ressortie des refuges pour sans-abri et des foyers pour femmes battues plus de dix fois en l’espace de dix ans. J’ai longtemps utilisé les refuges comme une béquille. Tant pis si la vie en communauté était plutôt frustrante, c’était mieux que d’être seule. D’une certaine façon, le personnel des refuges et les conseillers étaient ma seule famille. Mais ils n’étaient pas ma famille, ils ne faisaient que faire leur travail.

Quand on trouve enfin un logement convenable et que ces portes se referment derrière vous, on s’aperçoit soudainement que tous les conseils et toute l’aide donnés pendant ces quarante-deux jours semblaient inutiles. Lorsqu’on emménage dans un logement de bas salariés et qu’on est entouré de plus de cent familles qui ont presque toutes les mêmes problèmes, et dont beaucoup ne veulent pas changer, il est très difficile d’essayer de vivre une vie productive.

La société garde les gens comme moi dans un état constant de crise, sans assez d’argent pour nourrir et habiller nos enfants. Il faut changer quelque chose au système pour que les gens dans mon cas, qui sont en dessous du seuil de la pauvreté, puissent surmonter les obstacles et devenir des membres productifs de la société.

Date de publication: 
2007
Nouvel emplacement: 
London, Ontario, Canada