Cette publication fait partie de notre série de blogues du vendredi «Demandez au Rond-point». Vous avez une question en rapport avec l'itinérance et vous voudriez une réponse? Envoyez-nous un courriel à thehub@edu.yorku.ca et nous vous apporterons une réponse basée sur la recherche.

Cher Rond-point de l'itinérance,

Combien de fois n'ai-je pas rencontré une personne apparemment sans abri qui avait aussi l'air d'être atteinte d'une maladie mentale. Selon votre expérience, avez-vous découvert que la plupart des sans-abri sont aussi atteints d'une maladie mentale quelconque? Si oui, y-a-t-il une maladie mentale plus courante que d'autres?

Kerry Barbieri
Niagara Falls, Ontario

Cher Kerry,

Les troubles mentaux sont souvent mal compris dans notre société, et c'est en particulier le cas pour les sans-abri ou les personnes de la rue. Il peut être parfois difficile de déterminer combien de sans-abri sont atteints de troubles mentaux et leurs genres, ou de problèmes d'utilisation de drogues en raison du manque de recherches et de données. Il est aussi difficile de déterminer si ce sont ces problèmes mentaux ou d'abus de substance qui ont provoqué l'itinérance de cette personne, ou si ces problèmes sont nés de son expérience d'itinérance.

En 2007, l'Institut canadien d'information sur la santé a publié le rapport «Santé mentale et itinérance» qui soulignait un nombre d'études sur la santé mentale. Ce rapport comprenait des renseignements généraux qui étaient principalement axés sur les troubles de stress post-traumatique (TSPT), la schizophrénie, l'abus de drogues et la dépression. Des études ont révélé qu'au moins 29 % des usagers des refuges répondaient aux critères d'un trouble mental grave, y compris les troubles de personnalité antisociale (ainsi que la dépression), les TSPT ou des troubles psychotiques.

Troubles de stress post-traumatiques: Ce même rapport attire l'attention sur une recherche sur les jeunes sans abri qui a révélé que 24 % des jeunes répondaient aux critères des TSPT. De plus, 40 % des jeunes qui répondaient aux critères associés à la consommation de substances répondaient aussi aux critères des TSPT.

Schizophrénie: Il y a aussi des chevauchements avec la schizophrénie. Une étude de Toronto auprès de 300 usagers des refuges a révélé que 6 % étaient atteints de troubles psychotiques (y compris la schizophrénie). Une autre étude auprès de 124 usagers des refuges à Vancouver a révélé que 7 usagers de refuges sur 124 (presque 6 %) étaient atteints de schizophrénie. Il s'agit d'une augmentation considérable si on la compare au taux de diagnostics de la population générale de 1 %. La consommation de substances : partout au Canada, le sondage sur le bien-être a révélé qu'entre 1 et 4 % des Canadiens ont souffert de problèmes de dépendance de substance. Plusieurs études ont examiné la dépendance d'une substance et l'itinérance. Une étude à Toronto a trouvé que 68 % des usagers des refuges avaient rapporté un diagnostic de dépendance à un moment donné durant leur vie. Une étude de Vancouver a révélé que 44 % des adultes sans abri avaient pris des médicaments sans ordonnance. Une étude à Vancouver a trouvé que 55 % des jeunes avaient déclaré avoir consommé au moins une des drogues suivantes au cours de l'an passé : cocaïne, héroïne, amphétamines ou tranquillisants.

Dépression: Partout au Canada, entre 14 et 17 % des femmes et entre 7 et 10 % des hommes ont reçu un diagnostic de dépression. Dans une étude menée à Ottawa, 39 % des jeunes hommes sans abri ont rapporté des symptômes de dépression, comparé aux 20 % des jeunes hommes logés. Une étude séparée, également menée à Ottawa, a révélé que 33 % des hommes adultes sans abri ont déclaré éprouver des difficultés de santé mentale; 20 % souffraient de dépression.

Homelessness and mental Health in Canada

La Commission de la santé mentale du Canada (CSMC) estime qu'entre 25 et 50 % des sans-abri au Canada sont atteints de maladies mentales. Parmi ceux qui souffrent de graves troubles mentaux, jusqu'à 70 % éprouvent aussi des difficultés avec l'abus de substances.

La CSMC a aussi révélé que 520 700 personnes atteintes de troubles mentaux ne sont pas logées de façon appropriée, et que jusqu'à 119 800 personnes souffrant de maladies mentales sont sans abri. Malgré ces chiffres élevés, il n'existe que 25 000 logements sociaux disponibles actuellement au Canada.

Le rapport provisoire (septembre 2012) du projet At Home/Chez Soi administré par la CSMC déclare : «Plus de 900 individus provenant de nos refuges et de nos rues qui n'avaient pas été convenablement assistés par notre approche courante sont maintenant logés dans des environnements adéquats, abordables et appropriés. Quatre-vingt pourcent des participants résident toujours dans leur première ou seconde habitation (à la date d'août 2102). Au bout de 12 mois, les participants au programme Logement d'abord avaient passé une moyenne de 73 % de leur temps dans un logement stable. Cela représente la possibilité d'une meilleure santé à long terme et des résultats de fonctionnement social pour les individus ayant une histoire de traumatisme et de mauvaise santé. Une fois qu'ils sont logés, nombreux sont ceux qui commencent à bénéficier des logements plus sûrs et des possibilités ainsi créées pour procéder à des meilleurs choix de vie – y compris explorer les possibilités d'obtention d'emploi à plein temps ou à temps partiel.»

Comme vous le voyez, Kerry, il est difficile d'obtenir des chiffres exacts. Ce que la recherche nous apprend, est qu'il y a un lien important entre l'itinérance ou le logement précaire et les problèmes de santé mentale. Bien sûr, la recherche a prouvé que l'utilisation d'une approche Logement d'abord pour résoudre le problème de l'itinérance – quels que soient les problèmes d'un individu – permet à la personne de rester logée et de résoudre ses autres problèmes avec le temps.

Tanya Gulliver et Isaac Coplan
Rond-point de l'itinérance

Pour davantage de renseignements sur la relation entre l'itinérance et la santé mentale, visitez notre section Mental Health.