Le Parti libéral du Canada a dévoilé sa plateforme électorale en matière de logement en vue du scrutin du 20 septembre.

En voici 10 faits saillants.

1. Les libéraux veulent consacrer 1 milliard à des prêts et subventions pour financer les projets de location avec l’option d’achat. Pour ce faire, ils collaboreraient avec les secteurs privé, sans but lucratif, et coopératif, dans le but d’ « en cinq ans, créer une voie qui permettra aux locataires de devenir propriétaires ». Ils ne révèlent pas la proportion des prêts par rapport aux subventions.

2. Un gouvernement libéral mettrait sur pied un compte d’épargne libre d’impôt destiné aux jeunes Canadiens voulant faire l’achat d’une première propriété. Cela permettrait aux Canadiens âgés de moins de 40 ans d’épargner « jusqu’à 40 000 $ en vue de l’achat d’une première propriété, et de pouvoir retirer la somme sans devoir la rembourser ». Il est vrai que cela encouragerait l’achat de propriétés, mais je soupçonne que la mesure représenterait également une diminution importante de revenus pour les coffres fédéraux.

3. Ils promettent de rendre l’Incitatif à l’achat d’une première propriété plus flexible. Plus spécifiquement, les libéraux donneraient aux Canadiens « l’option d’un prêt hypothécaire différé comme solution alternative au modèle actuel de capital partagé, et diminuerait leurs paiements hypothécaires mensuels ». Sous le modèle actuel, une part de la valeur de la propriété doit être remboursé au gouvernement; cependant, cette nouvelle proposition permettrait au propriétaire de rembourser un montant fixe au lieu.

4. Les libéraux veulent augmenter le montant du crédit d’impôt d’une première habitation et réduire le coût de l’assurance hypothèque. Ils disent vouloir doubler de 5 000$ à 10 000$ le crédit d’impôt d’une première habitation. Ils veulent également réduire le coût de l’assurance hypothèque de la Société canadienne d’hypothèque et de logement de 25 %. Ils disent que cela représente une économie de 6 100$ pour une « personne typique ».

5. La plateforme contient plusieurs énoncés flous sur l’aide financière liée au logement qui sera offerte aux municipalités. Elle indique notamment que les libéraux créeraient un fonds de démarrage accéléré pour le logement qui mettrait 4 milliards à la disposition des municipalités pour les aider à créer « 100 000 domiciles pour la classe moyenne d’ici 2024-25 ». Le fonctionnement de ce fonds n’est pas expliqué davantage, et il n’est pas précisé s’il s’agit de subventions ou de prêts. La plateforme contient aussi la promesse d’aider les municipalités à rendre « des terrains urbains […] disponibles pour de nouveaux logements » pour éviter que de tels terrains « demeurent vacants entre les mains de spéculateurs fonciers ». Toutefois, la plateforme n’indique pas comment elle aidera aux municipalités à faire ainsi.

6. Les libéraux veulent plus que doubler le financement du Fonds national de co-investissement pour le logement (qui demeure très impopulaire). Parmi les professionnels canadiens dans le domaine du logement, ce programme n’est pas bien reçu. Son processus de demande est onéreux et nécessite une expertise considérable de la part des demandeurs. De plus, une fois que le financement est approuvé, il tarde à être déboursé (nécessitant le recours à des prêts-relais entretemps). De plus, les montants octroyés sont souvent insuffisants pour permettre de fixer les loyers à un montant abordable pour les locataires à faible revenu. Les libéraux disent aussi vouloir doubler le financement pour la conversion de bureaux vacants en logement (ce qui ressemble à l’Initiative pour la création rapide de logements).

7. Ils proposent un crédit d’impôt pour la rénovation d’habitations multigénérationnelles. Cela vise vraisemblablement à « aider les familles qui souhaitent ajouter un deuxième logement à leur habitation pour accueillir un membre de leur famille immédiate ». Aucune information supplémentaire n’a été annoncée à ce sujet. Les lois municipales ou provinciales devant être modifiées pour permettre une telle initiative ne sont pas claires.

8. Les libéraux s’engagent à développer une Stratégie sur le logement autochtone dans les zones urbaines, rurales et nordiques. Ils disent vouloir la mettre en oeuvre en partenariat avec les groupes autochtones. Ils disent également vouloir créer un centre national du logement autochtone pour permettre aux peuples autochtones de superviser les programmes de logements autochtones du fédéral.

9. Les libéraux proposent une charte des droits des acheteurs immobiliers (notons qu’ils ne proposent pas de charte des droits des locataires). Malgré l’empiètement sur les compétences provinciales/territoriales, les libéraux disent que cette charte :

  • interdirait les « offres à l’aveugle » (signifiant que toute offre serait connue après coup, réglant ainsi certains aspects de la manipulation des prix);
  • établirait un droit à l’inspection des domiciles (dans les marchés surchauffés, il est difficile de faire inspecter les propriétés actuellement);
  • garantirait « une transparence totale relativement à l’historique récente des prix des propriétés lors des recherches de titre » (en ce moment, il n’existe pas de façon simple et facile d’obtenir le prix des transactions récentes d’un quartier ou d’une propriété);
  • exigerait que les agents immobiliers « divulguent à tous les participants [les détails d’]une transaction quand ils prennent part du côté vendeur et du côté acheteur »;
  • irait de l’avant avec un registre public des bénéficiaires (comme celui qui existe déjà en Colombie-Britannique – lien en anglais);
  • assurerait que les prêteurs hypothécaires permettent de différer les paiements « jusqu’à 6 mois suivant la perte d’emploi ou d’autre événement de vie majeur »;
  • exigerait que « les prêteurs hypothécaires informent les acheteurs de la pleine gamme des programmes et d’options de financement à leur disposition » (ce qui est peut-être déjà le cas).

10. La plateforme contient une variété de mesures pour réduire la spéculation. Parmi celles-ci : décourager les augmentations de loyer « supérieures à une augmentation normale » (mais cela demeure une compétence provinciale); la création d’une taxe « anti-achat-revente sur les propriétés résidentielles, nécessitant que ces propriétés soient gardées pendant au moins 12 mois; » l’interdiction de « l’achat étranger de maisons canadiennes pendant les deux prochaines années; » et l’expansion de la future taxe sur les logements vacants appartenus par des non-résidents, non-Canadiens « pour inclure les terrains vacants à l’intérieur de grandes zones urbaines ».

En somme. Dans l’ensemble, cette plateforme semble cibler les jeunes électeurs davantage qu’elle vient en aide aux personnes à plus faible revenu. La décision de doubler le financement d’un programme de logement très impopulaire est presque aussi inquiétante que l’absence totale de mesures liées à l’itinérance.

Je souhaite remercier les personnes suivantes pour leur appui avec ce billet : Michel Laforge, Michael Mendelson, Steve Pomeroy, Sylvia Regnier, Tim Richter, Tsur Somerville, Vincent St-Martin, Ray Sullivan, Greg Suttor et plusieurs réviseurs anonymes.