Il existe un lien regrettable entre les familles d'accueil et l'itinérance. Il a été constaté que l'itinérance chez les familles est prévalente parmi les enfants qui ont été placés dans des familles d'accueil, et que des antécédents de famille d'accueil sont liés à une itinérance future.

Nombreux sont ceux qui ont critiqué le fait que le système d'aide à l'enfance n'offre pas de services pour les enfants de plus de 18 ans, puisque bon nombre des jeunes qui sortent des familles d'accueil ne possèdent pas les aptitudes à la vie quotidienne de base pour vivre indépendamment. En effet, une étude américaine a affirmé que le fait de devoir quitter les services d'aide à l'enfance en raison de la limite d'âge représente un «chemin direct vers la rue». Les jeunes qui ne sont plus admissibles aux services parce qu'ils atteignent l'âge limite font simultanément face à plusieurs défis, mais ils doivent surtout trouver un emploi stable et décent et un logement abordable. Au Canada, l'aide que les jeunes peuvent recevoir et jusqu'à quel âge dépend de chaque province/territoire. L'Ontario, par exemple, offre un certain nombre de bourses et des services aux jeunes en phase de transition. .

Il existe de nombreuses raisons pour lesquelles les jeunes qui quittent les services de l'aide à l'enfance deviennent des sans-abri. La transition à l'âge adulte peut être stressante même pour les jeunes qui vivent dans un environnement stable, et des enjeux structuraux tels la pauvreté, la racialisation et la marginalisation sont des facteurs qui contribuent à l'itinérance. Les enfants autochtones, par exemple, sont hautement surreprésentés dans le système de l'aide à l'enfance . Les enfants et les jeunes qui ont été pris en charge ont souvent moins de ressources matérielles et sociales, et ont tendance à atteindre des niveaux d'éducation moins élevés.

De plus, tel que décrit dans notre section sur les foyers d'accueil : «Lorsque les enfants sont placés dans une famille d'accueil, ils ne reçoivent pas toujours les thérapies pertinentes qui leur permettraient de résoudre les problèmes qui les ont menés aux foyers d'accueil. Cela peut comprendre la violence sexuelle et la violence physique, l'éclatement de la famille, des parents qui abusent l'alcool et les drogues, et des enfants abandonnés ou orphelins. En outre, ils ne reçoivent pas de traitement pour leurs propres problèmes de comportement qui en découlent.» Enfin, des placements multiples et la violence à laquelle ils sont potentiellement exposés au sein d'une famille d'accueil peuvent exacerber des problèmes déjà présents.

Femme qui a fait la transition en dehors des soinÉtudes existantes

Peu d'études ont été réalisées au Canada sur ce qui advient aux jeunes lorsqu'ils quittent le système de la protection de l'enfance, mais les découvertes existantes sont révélatrices. Une étude menée par Chez Toit sur 689 jeunes de la rue a trouvé que 43 % des jeunes répondants avaient été placés dans une famille d'accueil.

Une autre étude de Vancouver a suivi 497 sans-abri adultes touchés de maladies mentales sur une période de cinq ans et les a interrogé sur leurs antécédents familiaux et sur l'utilisation de drogues et d'alcool. L'étude a trouvé que 30 % des participants étaient passés par le système des familles d'accueil et «qu'une histoire de placement dans une famille d'accueil prédisait l'abandon de l'école secondaire, la durée de l'itinérance, des antécédents professionnels discontinus, des types de maladies mentales moins graves, des troubles mentaux multiples, une initiation précoce à l'utilisation de drogues et d'alcool, et une utilisation quotidienne de drogues.»

Les auteurs de Pilot Study: the Child Welfare System and Homelessness Among Canadian Youth a interrogé 36 jeunes Canadiens qui avaient été à la charge du système de l'aide à l'enfance, et dont 26 avaient connu l'itinérance. Parmi ces derniers, 16 avaient été placés dans des établissements à un moment donné.

Les chercheurs ont découvert que les jeunes qui avaient connu des expériences plus positives et moins de placements étaient moins susceptibles de devenir sans abri, et qu'avoir au moins une relation importante était essentielle au bien-être du participant. L'étude a également montré que l'âge était un facteur important : les jeunes qui quittaient le système à un plus jeune âge étaient plus susceptibles de devenir itinérants. Plus important encore, les chercheurs ont insisté sur l'importance d'une approche holistique à l'itinérance chez les les jeunes :

«D'une manière plus générale, les entrevues ont révélé que pour de nombreux jeunes sans abri, le logement seul ne suffit pas pour résoudre leur itinérance. L'itinérance que ces jeunes vivent va souvent plus loin que le manque de logement et comprend l'absence d'un emploi et d'aptitudes, un niveau d'éducation inférieur et peu de soutiens sociaux. Bien que la stabilisation de leur situation de logement serait un premier pas important, et ardemment souhaité par la plupart, les entrevues révèlent que d'autres soutiens sont essentiels pour rendre la sortie de l'itinérance durable.»

Des études menées en dehors du Canada ont trouvé des taux considérables d'itinérance chez les jeunes qui quittaient le système d'aide aux jeunes en raison de la limite d'âge.

Une étude effectuée en Iowa, Wisconsin et Illinois en 2009 a trouvé que parmi les 603 participants qui avaient quitté le système des familles d'accueil, 14 % avaient connu l'itinérance. Dans ce groupe, 54 % l'avaient connu à plusieurs reprises, et les deux tiers sont devenus sans abri dans le six mois après avoir quitté le système d'aide à l'enfance.

L'étude du Midwest a déterminé que près de 40 % des jeunes qui avaient été pris en charge ont connu l'itinérance ou logeaient chez des amis ou de la famille depuis qu'ils avaient quitté le système d'aide à l'enfance.

Solutions

Le projet Promoting Positive Outcomes for Youth in Care en Colombie-Britannique a déclaré que «les jeunes pris en charge par le système de l'aide à l'enfance doivent faire l'objet d'un processus de transition à l'âge adulte graduel et prolongé comme les jeunes de la population générale.» De même, en 2012, le Bureau de l'intervenant provincial en faveur des enfants et des jeunes de l'Ontario a recommandé l'extension des services aux jeunes jusqu'à l'âge de 25 ans.

Dans Une ère nouvelle : Repenser les interventions auprès des jeunes sans-abri du Canada , Stephen Gaetz préconise une réponse stratégique et intégrée plutôt qu'un système basé sur la réponse d'urgence à l'itinérance chez les jeunes , et qui est axée sur la prévention et les besoins spécifiques des jeunes.

Ce billet fait partie de notre série «Demandez au Rond-point». Avez-vous une question reliée à l'itinérance? Envoyez-nous un courriel à thehub@edu.yorku.ca et nous vous donnerons une réponse basée sur les recherches.

Photo : Assistante sociale